Un coin de ciel bleu
Où il est question de respirer en prenant la tangente, réelle ou virtuelle.
Un coin de ciel bleu, c’est miraculeux. Et parfois il est nécessaire d'aller le chercher ailleurs que chez soi. J’ai toujours aimé partir : petite, les vacances étaient rares, c’était le camping et la file PQ à la main pour aller prendre sa douche au milieu des autres vacancier·es, elleux non plus pas bien réveillé·es encore et se massant le dos / les épaules endolori·es par des nuits trop courtes et des apéritifs chargés. J’ai gardé de ces années-là le bonheur de la route, qu’elle soit très longue et ponctuée de haltes ou plus modestes, de l’improvisation, des journées sans programme précis et des aventures minuscules qu'on se crée ainsi. Partir, c’est toujours laisser un peu de soi : en ce qui me concerne, j’aime à penser que ce dont je me sépare, ce sont les soucis et le stress. Cette année, plus que les autres j’en avais besoin : août a signé deux départs, l’un physique, l’autre plus virtuel. Nous avons d'abord planifié quatre jours dans le Jura, avec une règle : pas de travail, rien que du plaisir, des visites, de la bonne bouffe.
Exit donc les visites chez les vigneron·nes mais pas tout à fait leur labeur : je me suis régalée de savagnins typés 1, de poulsard plein de fruit, de trousseau et autres petites bombes de raisin jurassiennes. Nous avons très bien mangé également, je l’ai partagé sur mon insta : retrouvez y les meilleures adresses. Surtout, on en a pris plein les mirettes et les mollets : la région autour d’Arbois est splendide, tout ce vert et ces vaches brunes et blanches qui tintinnabulent, les visites à faire nombreuses et les gens, gentils. Je recommande particulièrement l’Abbaye de Baumes les Messieurs, le château d’Arlay, pour la beauté de ses points de vue, et le musée de la Vache qui rit.
Évoquons le second départ maintenant qui bien que virtuel, est tout aussi essentiel pour moi : après moult tergiversations, des semaines d’hésitation, j’ai quitté Twitter, enfin X. Ce réseau m’a tant apporté au fil des années que j’y ai passé que la décision a été dure à prendre. Du boulot, des ami·es, des ressources militantes, des émotions, du rire, c’est peu de dire qu’il a pris une place énorme dans ma vie. J'ai parfois lâché le réseau, quand la fatigue s'y faisait trop sentir, quand je sentais le besoin de déconnexion. Mais j'y revenais toujours. Ma chère amie Fufu m'a expliqué le quitter, pour lui préférer Mastodon. J'ai compris son choix, mais j'ai continué à m'accrocher. J’ai aussi un compte sur Mastodon, mais il ne m’a jamais vraiment convaincu plus que ça. Je le trouve trop abrupt, je peine à m’y sentir réellement à l’aise : je ne sais si c’est la structure du réseau qui veut ça ou le fait que je ne m'y suis pas assez investie, sans doute un peu des deux, mais j’ai toujours préféré gardé Twitter en numéro un de mes RS. Comme ce vieux mec toxique que tu n’arrives pas à quitter. Ce n'était pas seulement une question de réseautage, de nombre de followers ou de gens qui s'y trouvaient que je ne voulais pas perdre de vue. Si on veut être honnête, avec les gens qui nous importent réellement, il n'est pas difficile de garder le contact. Tweet après tweet, discussions après discussions, j'avais bâti mon espace, avec mes habitudes. Je savais ce qui faisait réagir, je connaissais les règles, je savais avec qui je pouvais rire et de qui me protéger. Twitter était mon habitude : me lever et prendre le premier café du matin en lisant les tweets du soir ou de la nuit. La pointe de déception quand le compteur de replies était à zéro. Les tweets en journée pour déstresser, partager une actu ou une indignation. Ceux du soir, plus irréguliers. Je n'ai jamais fait le calcul de combien de fois j’ouvrais l’application par jour sur mon téléphone. Sur mon ordi, elle était toujours ouverte. Et pourtant, sur ce réseau que j'ai tant aimé, je ne me retrouvait plus : ces dernières semaines, chaque tweet devenait source de problèmes potentiels, d’insultes, même les plus innocents ou les moins polémiques d’entre eux, attirant les trolls comme autant de mouches à merde. Mais j’y comptais encore quelques copain·es, alors j’usais du mute, du block, et je faisais comme si tout allait bien. Sauf que c’est d’abord en me coupant quelques jours de twitter que j’ai pris conscience de sa toxicité, puis en établissant mon nid sur Bluesky. 2Peu à peu, je me suis mise à mieux respirer, ma nuque à se détendre, et je me suis mise à moins rafraichir ma timeline twitter frénétiquement.
Qui dit nouveau lieu, dit nouveaux repères à trouver et nouvelles règles aussi. Je me rends compte que ce que j’appliquais difficilement sur twitter (ne pas réagir à chaud, ne pas quote RT pour débattre, souvent avec une pointe d’agressivité), je le fais naturellement sur bluesky. Peu à peu, je n’ai plus consulté twitter que pour les messages privés — une fonctionnalité pas présente sur bluesky, et de moins en moins jusqu’à ce que je me rende compte qu’il fallait que j’y pense pour y aller. Je ne ferme pas mon compte, ne serait-ce que pour y garder mon handle : il passera sans doute en privé. 3 Partir c’est respirer. On verra si ce nouveau réseau tiendra ses promesses : pour le moment, je m’y sens bien, même s'il n'est pas parfait et ne le sera sans doute jamais. Même les meilleures intentions ne suffisent pas à rendre un espace safe : je crois cependant qu’on peut apprendre de ses erreurs et ne pas les reproduire. Partir, pour mieux se trouver. Contrairement à Mastodon, qui n’a jamais été ma maison, mais bien ma tente de “vacancières”, j’ai bien l’impression que Bluesky pourrait le devenir.
On dit “typé” pour des vins qui ont vieilli sans être ouillés, ce qui veut dire qu’on les a laissés en tonneau sans les remplir pour contrer l’évaporation naturelle. Il se forme alors à la surface du vin un voile, composé notamment de levures, et en dessous le vin se transforme pour gagner un côté très sec et des arômes de noix et de cire caractéristiques. Si on attend près de 7 ans, on obtient un vin jaune.
Le réseau bluesky est très semblable à twitter ancienne mouture, avec des features un peu différentes. Pour le moment, il faut une invitation pour y créer un compte.
C’est là que je me dis que la rupture est vraiment difficile : on garde un contact “au cas où” ça irait mieux.
Bravo, il est temps d'arrêter se s'aigrir, X/Twitter est devenu AigreurLand, ça ne fait du bien à personne
Je crains qu'il y ait un nouveau clivage, entre les utilisateurs et utilisatrices de X et celles et ceux qui construiront ailleurs. Lhumanite ne sait plus quoi inventer pour se faire désagréable, c'est con, on a tout pour être heureux et heureuses bien souvent !
En tous cas, merci du calme qui ressort de ce post, ça me fait du bien par écran interposé.
A bientôt sur Bluesky, pour l'instant réservé aux happy few.
Quant à triture x il est devenu tellement toxique que je ressasse l'envie d'en partir. Je n'y poste même plus. Tout n'est qu'agressivité dessus. Je vais dire aux 3 contacts que je ne veux pas perdre de passer par un autre biais pour me contacter et basta. Jusque là je n'arrivais pas à virer l'appli. Je crois que tu m'en as convaincu ❤️
C'est le réseau de mes premiers pas, grâce à Antonin.
Mais à l'époque c'était bisounoursland et je m'y sentais bien.
Aujourd'hui même LinkedIn est un endroit où les gens se déchirent.
Insta a l'air de résister.
Bonne journée, Sand. Et vive la Franche-Comté.